Vélimir Khlebnikov
Griffure du ciel (1)
Mis en musique et en voix par Kelvin RAS
Vélimir Khlebnikov est un des premiers poètes sonores, l’oralité jaillit littéralement de ses écrits, des enregistrements témoignent de certains de ses textes en langue Zaoum, cette langue inventée qu’il nommait transmental language, il en était avec Maïakovski le fondateur. A l’orée du 20ème siècle il se lance dans une écriture à nulle autre pareille. Le point culminant de sa recherche pour démanteler la langue de ses encombrements est son départ en 1919 vers l’un des points les plus brûlants de la guerre civile, l’Ukraine. Son errance va durer plus de trois ans à la suite desquelles il sera emporté par la misère et la gangrène à Santalovo, un village du nord de la Russie, près de Novgorod. La valise dans laquelle il transportait ses manuscrits a fait place à une devenue légendaire taie d’oreiller dans laquelle il entasse ses écrits, poèmes, proses, lettres, feuilles parfois volées ou envolées, sur laquelle il s’endort. Il écrit dans l’urgence, dans l’obscurité, dans la maison des fous, au profond de la faim, des abris de fortune, devant les feux de camp où s’échangent pain et poème. Sa poésie est une langue des oiseaux, une poésie stellaire, mais aussi une écriture des nombres… Il écrit à Maïakovski le 18 février 1921 : « Je pense écrire une chose dans laquelle toute l’humanité, 3 milliards, participerait et où elle serait obligée de jouer. Mais la langue habituelle ne convient pas pour la chose, il va falloir pas à pas en créer une nouvelle. ».
Voilà ni plus ni moins son aspiration folle d’une langue universelle, parlé par tous, un projet fou porté par un fou du verbe et des nombres, projet qui n’aboutira pas, mais qui laissera des traces dans la poésie sonore contemporaine qui rêve toujours d’un parler qui transcende les frontières, tant nationales qu’intellectuelles. Attendant toujours que l’humanité s’éveille au parler vrai, à ce verbe créateur d’univers, où le son porte l’action, où sa vibration s’incarne sur le champ, pulvérisant ainsi pensées et mémoires obsolètes qui nous cantonnent à être leurs serviles sujets, au lieu d’être des co-façonneurs de mondes à naître.
J’ai choisi 4 des 8 textes qui composent ces Griffure du ciel écrit en 1920; il y a de cela plus d'un siècle !
Kelvin RAS est poète & paysagiste sonore. Il définit sa musique comme primale, au sens d’originelle, où le son est travaillé
en tant que vibrations et non en tant que notes. Sa démarche est celle d’un parfait autodidacte, où seul son oreille compte. Les mots pour lui sont du son qu’emprisonne le sens. Ses propres poésies sonores manient l’humour et l’humeur au scalpel....more
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